Lorsqu’une situation de harcèlement sexuel ou de discrimination est signalée, il est crucial que l'enquête menée soit juste, transparente et conforme aux règles du Code du travail. Dans une décision marquante du 11 juillet 2024, la Défenseure des droits nous éclaire sur les pratiques à éviter et les droits des salariés. Vous êtes élu CSE et vous faites face à une enquête interne sur de tels faits ? Voici ce que vous devez savoir pour défendre vos droits et contester une enquête qui ne respecterait pas la procédure.
Contexte : une salariée dénonce un harcèlement sexuel lié à son engagement syndical
Une salariée alerte son employeur sur des faits de harcèlement sexuel commis par un collègue. Ces agissements seraient liés à son activité syndicale. Après le signalement, elle démissionne de ses fonctions syndicales et est placée en arrêt maladie.
L’employeur diligente une enquête interne, conclut à l’absence de preuve, et décide de séparer les deux salariés. Pourtant, la Défenseure des droits pointe de graves manquements dans cette gestion du dossier.
Les manquements constatés dans l’enquête interne
1. Inversion de la charge de la preuve
Le Code du travail est clair : lorsqu’un salarié dénonce un harcèlement, il doit simplement apporter des éléments laissant supposer l’existence de faits. C’est ensuite à l’employeur de démontrer que ces faits ne constituent pas un harcèlement.
Dans cette affaire, l’employeur a exigé des preuves directes de la part de la victime, ce qui est contraire à la loi.
2. Ignorance des éléments de preuve et des présomptions
La salariée avait transmis des SMS, e-mails et témoignages qui soutenaient ses accusations. L’enquête interne a ignoré ou écarté ces preuves, notamment le harcèlement d’ambiance, une forme insidieuse mais reconnue de harcèlement sexuel.
3. Enquête non conforme et déloyale
La Défenseure des droits a pointé plusieurs anomalies graves :
- Témoignages tronqués ou écartés sans justification ;
- Témoins non entendus ;
- Durée excessive de l’enquête (près de 9 mois) ;
- Conclusion incohérente, avec séparation des salariés sans reconnaissance des faits de harcèlement.
4. Atteinte à la confidentialité
Les conclusions de l’enquête ont été communiquées publiquement en réunion, sans respect de la confidentialité vis-à-vis de la victime. Cette pratique est contraire aux règles internes et porte atteinte à la dignité de la salariée.
5. Absence de sanction et représailles illégales
L’employeur n’a sanctionné aucun comportement malgré les éléments recueillis. Il a ensuite menacé la victime de poursuites pour avoir enregistré des conversations à l’insu des collègues, alors même que la jurisprudence autorise ce type d’enregistrement pour prouver un harcèlement.
Ce type de réaction est une forme de représaille illégale, strictement interdite par la loi.
Ce que doivent retenir les élus du CSE
Cette affaire rappelle l’importance de mener des enquêtes internes rigoureuses, respectueuses des droits des victimes et conformes à la loi.
Voici les principes essentiels que tout CSE doit faire respecter :
- ✅ Respect de la charge de la preuve : la victime doit seulement apporter des éléments laissant supposer un harcèlement.
- ✅ Prise en compte de toutes les présomptions : mails, SMS, témoignages, comportements ambigus.
- ✅ Enquête loyale et rapide, menée dans un délai raisonnable.
- ✅ Confidentialité absolue à chaque étape.
- ✅ Sanctions effectives en cas de harcèlement confirmé.
- ❌ Aucune représaille ne doit être exercée contre la victime.
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